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Le référé liberté face au Covid 19 : Un combat perdu d’avance ?   Par Pierre-Paul MUSCATELLI, avocat associé

Le référé liberté face au Covid 19 : Un combat perdu d’avance ? Par Pierre-Paul MUSCATELLI, avocat associé

Publié le : 22/04/2020 22 avril avr. 04 2020

La crise sanitaire liée à la pandémie de covid-19 a rapidement impliqué les juridictions administratives, aussi bien les premiers juges que la haute Assemblée, saisis par des professionnels de santé et certains de leurs syndicats par la voie du référé liberté de l’article L 521-2 du code de justice administrative.

Sur le fondement de ce texte le juge peut, en présence d’une situation d’urgence caractérisée et dès lors qu’il constate une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale du fait de l’action ou la carence d’une personne publique, ordonner à cette dernière de prescrire les mesures de nature à faire disparaître cette atteinte.

Si le Conseil d’Etat a, à cette occasion, réaffirmé que le « droit au respect de la vie » est au nombre des libertés fondamentales au sens dudit article (Cf. entre autres CE Ord.28 mars 2020 SMAER – Req n° 439726), il a dans le même temps fait une stricte application des principes posés par l’arrêt « Section française de l’Observatoire international des prisons » (CE 28 juillet 2017 – Req n° 41067). 

Principes suivant lesquels « le caractère manifestement illégal de l’atteinte doit s’apprécier notamment en tenant compte des moyens dont dispose l’autorité administrative compétente et des mesures qu’elle a déjà prises », tandis que « dans tous les cas, l'intervention du juge des référés dans les conditions d'urgence particulière prévues par l'article L. 521-2 précité est subordonnée au constat que la situation litigieuse permette de prendre utilement et à très bref délai les mesures de sauvegarde nécessaires ».

Allié à des motivations parfois déconcertantes, ce cadre jurisprudentiel a brisé les espoirs mis dans les recours juridictionnels pour contraindre l’administration a revoir sa politique de gestion de crise.  

I - C’est ainsi que le Conseil d’Etat a jugé, s’agissant des dispositions gouvernementales limitant les déplacements dans le cadre de la lutte contre la propagation du virus, que le fait pour le Premier Ministre de ne pas avoir prescrit un confinement total de la population ne pouvait être regardé comme une carence grave et manifestement illégale.

Le juge ayant pris en considération à la fois la nature des mesures déjà en vigueur et leur adaptabilité en fonction de l’évolution de la situation et les « moyens dont l’administration dispose », lesquels lui sont ainsi apparus insuffisants pour faire face aux conséquences d’un confinement total (CE Ord 22 mars 2020 « Syndicat Jeunes Médecins » - Req n° 439674).

II - Pour ce qui est ensuite du dépistage et des matériels ( Tests et masques) l’ordonnance « SMAER », tout en retenant « l’insuffisante disponibilité des matériels » considère, après avoir acté des dispositions gouvernementales pour augmenter les capacités de tests (Et par là même la dotation en matériels qui s’y rattache), qu’il n’entrait pas dans les pouvoirs du juge du référé liberté d’ordonner la massification du dépistage.

 Et donc de prescrire à l’Etat de faire l’acquisition des tests nécessaires pour y procéder.

Ce faisant la juridiction a simplement pris en considération à la fois les moyens dont disposaient les pouvoirs publics et les mesures déjà adoptées par ceux-ci pour rejeter la demande du syndicat requérant.  

L’absence de toute information précise sur les dates de mise à disposition des masques (« livraisons attendues prochainement ») n’a pas empêché le Juge de se cantonner à la stricte teneur des annonces gouvernementales pour aller dans le sens des moyens de défense opposés par l’Etat.

Dans le même ordre d’idées, l’attente d’une « prochaine production » de simples « prototypes de nouveaux modèles de masques » lui est apparue comme à mettre directement au crédit de ce dernier.

Tout en reconnaissant les insuffisances actuelles, le Conseil d’Etat s’en tient à une motivation ne reposant sur aucune certitude en évoquant une situation qui « devrait connaitre une nette amélioration », et des mesures « pour certaines » - et donc pas toutes – déjà appliquées.

De surcroît, Il n’évoque à aucun moment quels seraient les « besoins réels » du pays en matériel, ce qui peut apparaître de prime abord comme paradoxal.

Comment apprécier en effet s’il y a ou non en l’espèce manquement de la part de l’Etat, et dans l’affirmative de quel ordre, sans quantifier préalablement lesdits besoins ?

La situation de carence ne peut objectivement s’appréhender que par rapport à ces derniers.

De même, et par voie de conséquence, s’agissant du caractère, suffisant ou non, des mesures prises pour les satisfaire. 


III - Enfin, et sur l’extension de l’utilisation de l’hydroxychloroquine par rapport au cadre fixé par le décret n° 2020-314 du 25 mars 2020, le Conseil d’Etat s’est appuyé – toujours à travers la décision « SMAER » - sur les « recommandations » d’un Haut Conseil de la Santé Publique sceptique au regard des préconisations du professeur RAOULT,  en relevant néanmoins que les premiers résultats de l’essai clinique européen « Discovery », attendus incessamment, pourraient conduire à reconsidérer très rapidement les protocoles de soins. 


IV – Ces mesures gouvernementales, aidées tout à la fois par l’encadrement jurisprudentiel de l’article L 121-2 du CJA et la  bienveillance dont fait preuve la  plus haute juridiction administrative à l’égard des pouvoirs publics sur des problématiques sanitaires majeures,  ont résisté à tous les référés liberté jugés à ce jour…

Reste à espérer qu’elles seront suffisamment fortes pour vaincre à elles seules le virus !
 

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