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Le covid-19 : De la durée des plans, de l’exigibilité des échéances ou de la bouteille à l’encre ? Par Claude CRETY, avocate associée

Le covid-19 : De la durée des plans, de l’exigibilité des échéances ou de la bouteille à l’encre ? Par Claude CRETY, avocate associée

Auteur : Claude CRETY
Publié le : 30/04/2020 30 avril avr. 04 2020

C’est un lieu commun que de dire que la crise sanitaire impacte de plein fouet les entreprises quel qu’ait été leur état de santé avant elle ; 

Les convalescentes, encore sous traitement d’un plan d’apurement de dettes antérieures se trouvent doublement handicapées, contraintes d’honorer leurs échéances en temps et en heure entre les mains de leur commissaire à l’exécution du plan, sous peine de se voir rappelées à l’ordre par la menace d’une résolution.

L’ordonnance n° 2020-341 du 27 mars 2020  dite « d’ adaptation des règles relatives aux difficultés des entreprises … »,  est censée leur venir en aide, en leur permettant de proroger la durée de leur plan de sauvegarde ou de redressement.

Mais qui dit prorogation du plan, ne veut pas forcément dire suspension de l’exigibilité des échéances à la date fixée par le jugement d’homologation du plan !

Or, ce qui, prioritairement, intéresse les chefs d’entreprise,  en ces temps  troublés, c’est leur trésorerie !

Hélas, la piètre qualité rédactionnelle des textes qui régissent notre vie, ne s’est pas améliorée à la faveur de la crise sanitaire. Loin s’en faut ! Les esprits tortueux le demeurent en toutes circonstances, et il y a bien longtemps qu’ils ne font plus leur, l’adage « nul n’est censé ignorer la loi », qui devrait pourtant les obséder lorsqu’ils conçoivent leur prose indigeste.

L’ordonnance n°341 précitée, se complète ou se lit (selon l’humeur) avec notamment et pour l’instant :
1.    La loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 « d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 » 
2.    L’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 « relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période »
3.    L’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 « portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale »
4.    La circulaire de présentation des articles 1er, 2, 3 et 5 de l’ordonnance n° 2020- 341 du 27 mars 2020 du Garde des Sceaux, corrigée le 1er avril 2020

Attention fort risque de strabisme.

Accroche toi lecteur (on se tutoie, ça rapproche), on y va : 

1.    L'état d'urgence sanitaire a débuté le 24 mars avec la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020, pour un délai de deux mois qui expirera donc le 24 mai prochain ; Il est prorogé jusqu’au 10 juillet prochain.
2.    L’article 2 de l’ordonnance n° 2020-306 prévoit que les actes prescrits par la loi ou le règlement qui devaient être accomplis entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire pourront être réalisés dans un délai de deux mois après cette période.
3.    L’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 rend applicable aux délais de procédure devant les juridictions statuant en matière non pénale, le report des délais prévu par l’article 2 de l’ordonnance    n° 306 ci-dessus. 


« C’est bien beau ça, mais la « loi et le règlement » et « les délais de procédure » ça ne concerne pas mon plan, et donc  l’ordonnance n° 2020-341 du 27 mars 2020, censée nous intéresser que prévoit-elle ? », me diras-tu ?  

Eh,  lecteur ne soit pas impatient ! Tu as le temps,  n’es-tu pas encore confiné ? Profites-en pour prendre des notes, elles vont te servir pour la suite. 

Donc, l’ordonnance n° 2020-341 dit que, s'agissant des plans arrêtés par le tribunal :

« 1° Jusqu'à l'expiration du délai prévu au I (Lire : Jusqu’à l’expiration d’un délai de trois mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire), le président du tribunal, statuant sur requête du commissaire à l'exécution du plan, peut prolonger ces plans dans la limite d'une durée équivalente à celle de la période prévue au I. Sur requête du ministère public, la prolongation peut toutefois être prononcée pour une durée maximale d'un an ;
2° Après l'expiration du délai prévu au I, et pendant un délai de six mois, sur requête du ministère public ou du commissaire à l'exécution du plan, le tribunal peut prolonger la durée du plan pour une durée maximale d'un an.
IV. - Jusqu'à l'expiration du délai prévu au I, le président du tribunal, statuant sur requête de l'administrateur judiciaire, du mandataire judiciaire, du liquidateur ou du commissaire à l'exécution du plan, peut prolonger les délais qui sont imposés à ces derniers d'une durée équivalente à celle de la période prévue au I. » 


Ça c’est l‘article 1.

Mais il y a aussi l’article 2 qui dit :
 
« II. - Sont prolongés, jusqu’à l’expiration du délai prévu au I, ( lire : un mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire) d’une durée équivalente à celle de la période prévue au I :
 1° Les durées relatives à la période d’observation, au plan, au maintien de l’activité, et à la durée de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée, prévues par les titres II, III et IV du livre VI du code de commerce, ainsi que la durée prévue par l’article L. 661-9 du même code ; »


Tu te grattes la tête lecteur ? Rassure-toi moi aussi !  

Je vais essayer de décoder…un peu…mais un peu seulement … :

Bon,  alors en résumé :

1.    D’abord, tu as la période juridiquement protégée (état d’urgence sanitaire + 1 mois), soit concrètement jusqu’au 24 juin actuellement,  voire plus tard si l’état d’urgence  est prorogé ;  

La durée du plan est automatiquement prorogée de cette durée (3 mois, voire plus si la loi d’urgence sanitaire est elle-même prorogée de 2 nouveaux mois) :

Ton plan qui finissait le 31 décembre 2020, finira le 31 mars 2021.

C’est d’office ; Tu n’as rien à faire… Enfin,  a priori … Car, il n’est pas si clair que ça que ton échéance exigible pendant cette période ne te soit pas réclamée par ton commissaire à l’exécution du plan (Cet avide !) 

« Pourquoi , c’est logique ? » me diras-tu ; Naïf que tu es ! C’est logique, mais ce n’est pas écrit, te dirais-je, et quand ce n’est pas écrit c’est source d’embrouilles ainsi que je ne cesse de te le dire depuis des années ! 


2.    Ensuite,  tu as la période de l’article 1 de l’ordonnance n° 341 (état d’urgence + 3 mois) soit concrètement jusqu’au 24 août actuellement,  voire plus tard si l’état d’urgence est prorogé ;  

Là, il faut que tu te bouges un peu… Tu appelles ton avocat préféré.

Pendant cette période (ton avocat préféré, mais bon si tu veux le faire toi-même ne te prives pas) va pouvoir saisir :
-    Soit ton commissaire à l’exécution du plan,  pour qu’il présente requête au  Président du Tribunal qui a homologué ton  plan, pour obtenir une prorogation de  3 mois.
-    Soit le Procureur de la République,  pour qu’il présente requête au  Président du Tribunal, pour obtenir une prorogation de ton plan de 12 mois maximum.

Ton plan qui finissait le 31 décembre 2020, pourra finir le 31 juin 2021 et si tu t’y prends bien le 31 mars 2022… tu suis ?

Enfin ça, je te le dis avec des réserves, parce que quand je lis la circulaire du Ministre de la Justice, je m’y perds un peu… à moins que ce soit lui…mais on ne va pas polémiquer hein !


3.    Enfin,  après la fin de l'état d'urgence plus 3 mois et pendant un délai de 6 mois, le tribunal - et non plus son président - pourra  à nouveau prolonger la durée de ton  plan pour une durée maximale d'un an sur requête du ministère public ou du commissaire à l'exécution du plan :

Ton plan qui finissait le 31 décembre 2020, si tu m’as bien suivie plus haut et si ton entreprise et ton avocat ont vraiment beaucoup de talent, pourra finir le 31 mars 2023 !


« C’est Byzance! Tu vas pouvoir faire proroger mon plan jusqu’à plus de 2  ans, les doigts dans le nez,  même si au départ on m’avait accordé la durée maximale de 10 ans» me diras-tu encore ;

On  se calme, la Ministre a dit (dans sa circulaire) que oui les délais sont cumulatifs, mais QUE « dans le principe » et qu’ils doivent « être mis en œuvre avec prudence », de sorte que le cumul des délais accordés par le président puis par le tribunal doit être « tout à fait exceptionnel ». 

Là tu commences à comprendre que tous les beaux commentaires que tu lis sur internet sur le sujet, c’est peut-être « juste une illusion, comme une bulle de savon, qui s'approche de toi, que tu touches du doigt, puis qui s'en va, qui n'est plus là… » (moi aussi j’ai des références culturelles)

Et puis, tu n’as toujours pas la réponse à ta question : mon échéance que je ne peux pas payer, je fais comment ?

La Garde des Sceaux y répond dans sa circulaire ;  Ne voulant pas dénaturer son propos je te le livre « ex abrupto » comme on dit :
Les différentes prorogations accordées « justifieront, le cas échéant, un rééchelonnement des échéances prévues par le plan,  exigibles après la date de la décision ou après le 12 mars. »

Tu apprécies « le cas échéant » ? 

En conclusion : Tu appelles ton avocat, on va bien te trouver une solution avec les Juges !
 

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